Bonsoir,
J'ai mis plusieurs années à décider de témoigner. Non que mes symptômes aient été particulièrement éprouvants (quoique) par rapport à ce que d'autres endurent, mais il m'a fallu ce temps pour être sûre et constater une amélioration notable... Et aussi pour admettre que retrouver un état de santé correct (à défaut d'être le même "qu'avant") est prioritaire, par rapport à ce grand, immense, incommensurable sentiment d'injustice et de colère.
Implantée le jour de mes 40 ans (en 2011), parce que le médecin qui m'avait parlé de ça était certain que la loi française n'autorisait la stérilisation qu'à partir de cet âge-là (?), j'ai accepté cette solution, comme nous toutes, ici : parce que c'était simple, rapide, magique. La solution idéale. J'ai lu dans vos témoignages qu'on nous avait vendu du rêve, c'est tellement vrai !
L'implantation était supposée se dérouler sous hypnose. La vérité est que l'infirmier anesthésiste avait une forte ressemblance avec un acteur comique, que sa formation d'hypnose médicale avait dû se terminer la veille et durer une demi-journée, et qu'heureusement que je ne suis ni douillette, ni anxieuse. C'était désagréable, un peu douloureux, mais sans plus, cela reste anecdotique en rapport avec ce qui suivra. Je suis retournée travailler l'après-midi, avec un peu mal au ventre, simplement.
C'est deux ou trois semaines après que j'ai commencé à me dire que c'était peut-être une erreur : il y avait un délai de trois mois pour être sûr que les trompes étaient bien "fermées", et entre-temps je n'avais pas de contraception. Mais avec mes règles, j'ai découvert un nouveau monde : la douleur menstruelle. Je n'avais que rarement connu ça, et jamais à haute intensité : là, j'ai revécu les sensations de mes accouchements durant le premier jour des règles.
Bien sûr, dès le lendemain j'appelai le secrétariat du gynécologue, pour lui en parler. Sa réponse fut simple : "rien à voir".
Ma confiance a commencé à s'effriter à ce moment-là. Mais je me disais aussi que je pouvais bien souffrir quelques mois, le temps que mon corps accepte ce corps étranger, car ne plus avoir à me tracasser ou subir des hormones de synthèse pour éviter une grossesse méritait bien ce petit sacrifice...
Ok pour les règles douloureuses, donc. Mais je n'avais jamais connu non plus le côté hémorragique : chez moi, c'était tous les 27 à 29 jours, ça durait trois jours, léger-léger, et fin de l'histoire (peu importe la contraception utilisée, même avec des stérilets, mes règles étaient assez discrètes). Là, le flux était continu, puissant, nuit et jour, fuites assurées et inconfort absolu ! Bon, un autre petit sacrifice, ok, tu peux bien faire ça : souffrir un jour ou deux par mois, et saigner 6 jours et 7 nuits... Tous les 23 jours maintenant ? Ah, ok. Admettons.
Sauf que les règles longues et hyper abondantes, ça fatigue, ça tache, ça finit par jouer sur le moral. A moins que ce ne soit ces nouvelles douleurs qui apparaissent sporadiquement, qui me réveillent parfois la nuit et m'empêchent de faire mon yoga, d'aller à mon cours de danse, ou de marcher tranquillement le dimanche matin ? Peut-être un mélange de tout ça.
Dans le même temps, ma fille, adolescente en besoin de conflit, me reproche régulièrement de ne pas l'écouter, de ne pas tenir compte de ses paroles. Je mets ça également sur le compte de ses hormones et de sa susceptibilité, et peut-être aussi, je dois le reconnaître, sur mon petit côté tête-en-l'air, que je développe un peu plus chaque année. Je dois vieillir (et d'ailleurs, mes douleurs aléatoires, c'est sans doute l'âge aussi).
Je commence aussi à oublier mes rendez-vous (quand c'est chez le médecin c'est pas sympa, mais comme il a souvent une heure ou plus de retard, finalement, c'est un service que je lui rends ! mais quand c'est avec un de mes clients, c'est encore moins bien, car cela signifie souvent que je perds un contrat, voire carrément le client !). Je prends l'habitude de tout noter, mais même en regardant le matin quelles sont mes tâches et mes rendez-vous de la journée, je les oublie en cours de route. D'une heure à l'autre. Ma fille avait peut-être raison. Ou je suis une mauvaise mère, qui vieillit, donc. Ou bien c'est à cause de la fatigue.
Cette fatigue ! je me lève en ayant envie de dormir, je peux me coucher à 21h, faire une nuit complète et être épuisée en me réveillant à 8h. Je fais des siestes, aussi souvent que possible, qui peuvent durer trois heures !
Les douleurs augmentent avec le temps. J'ai du mal à marcher parfois, et monter mes escaliers est devenu un calvaire. J'ai souvent lu cette phrase ici : j'ai un corps de 80 ans alors que je n'en ai que 45 ! Mon généraliste ne comprend pas (ne fait pas trop d'efforts non plus, je dois le dire) : il pense à une fibromyalgie (mais rien qui permette de la diagnostiquer de manière certaine), puis conclut en spasmophilie (cette errance médicale m'aura appris au moins une chose ou deux : quand on ne sait pas ce que vous avez, c'est soit de la spasmophilie, soit le côlon irritable, soit de la dépression ! Des conclusions rapides, où jamais un praticien ne semble pouvoir reconnaître avec humilité qu'il ne sait tout simplement pas…). Il m'envoie chez un neurologue. Puis un rhumatologue. Puis un endocrinologue. Il dit que je fais de l'anxiété. Entre temps, j'ai commencé à développer des douleurs abdominales récurrentes et inexpliquées : mon ventre gonfle et me fait souffrir, je ressemble à une femme enceinte de six mois (et de 80 ans, donc !). J'alterne diarrhées épouvantables et constipation douloureuse. J'oublie de plus en plus de choses (mais je ne m'en rends pas encore compte). Je prends du poids, doucement mais sûrement (jusqu'en 2018, date du retrait des Essure j'ai pris12 kg).
De 2011 à 2017, donc, cinq années absolues de douleurs, pas suffisantes pour être identifiées, mais pour me gâcher un peu la vie quotidienne. Et un soir, mon compagnon rentre presque victorieux, et me parle de l'association RESIST, il a entendu parler des implants à la radio, tout peut être lié, renseigne-toi.
Je me suis renseignée. J'ai lu les témoignages, compris que non, je n'étais pas folle, je suis allée voir un allergologue, qui a noté les réactions très fortes à l'étain, et j'ai consulté des chirurgiens gynécologues pour me faire retirer ces ressorts empoisonnés... Huit ! Huit chirurgiens, avant de trouver celle qui (alors qu'il n'y avait pas encore de protocole d'explantation, et que l'association précisait déjà qu'il ne fallait surtout pas casser ou couper les implants pour éviter les risques de fragments restant dans l'organisme) m'écoute, comprenne, prenne en charge et explique son protocole. Les huit autres ? "Oh, c'est sûrement autre chose, mais oui, je peux les enlever", ou "Ah moi j'ouvre en grand et je retire tout, de toute façon, vous n'aurez plus besoin de votre utérus, hein !", ou encore "J'ai 100% de réussite sur cette intervention" - moi : "vous en avez opéré combien ?" - lui : "trois"...
L'opération s'est bien passée. Une des cicatrices de la coelio est un peu compliquée, mais la radio de contrôle parfaite : il ne reste rien. Dès le troisième jour post-op, mes douleurs avaient quasiment disparu. Mes règles sont redevenues normales, dans la foulée... Mon ventre fait toujours des siennes, et j'essaie encore de perdre du poids, mais j'ai retrouvé la pêche, la fatigue a disparu comme par magie aussi dans les deux premiers mois. Si on ose encore me dire que "ça n'avait rien à voir", je pense avoir suffisamment d'énergie pour mordre ! Ma mémoire et mon attention sont revenues, assez vite. Et j'ai fini, à force de lire vos témoignages à toutes, par faire le lien, et comprendre que ça aussi, c'était un effet secondaire.
J'ai eu de la chance : rien de dramatique, et même si, cinq ans après l'explantation, je ressens encore des petites choses inexpliquées, j'ai pu vivre mes derniers cycles et une ménopause "normaux", j'ai pu prendre conscience de beaucoup de choses qui m'auraient sans doute été épargnées sans les métaux lourds, sans les allergisants et autres perturbateurs endocriniens composant ce dispositif médical.
Aujourd'hui, je suis en colère : pas seulement contre le laboratoire qui a (une fois de plus) fait de nous des cobayes, mais aussi et surtout contre les pouvoirs publics qui permettent ça, qui ne nous ont pas informées (et continuent de ne pas le faire), ni n'ont informé les médecins, contre lesquels j'ai aussi une petite rancœur : l'information peut aussi venir de vos patientes, et la plupart du temps, elles n'inventent rien, voire même quand elles viennent consulter, c'est souvent qu'elles souffrent beaucoup et depuis longtemps.
A quand une vraie prise en considération ? C'est cela et seulement cela qui permettra une vraie prise en charge.